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De nos jours, l’alimentation de nos poissons d’aquarium ne pose aucune difficulté. De nombreux aliments équilibrés , vitaminés et adaptés aux différents régimes alimentaires sont disponibles sur le marché aquariophile. Le risque de toute carence nutritive est écarté. Parallèlement à ces aliments préparés, les nourritures vivantes, récoltées ou élevées, sont indispensables pour éviter la mono-alimentation. Elles sont quasiment indispensables pour mener à bien une reproduction et obtenir de beaux sujets au mieux de leur forme et de leurs couleurs.
Les larves de moustiques
Parmi les nourritures vivantes adaptées aux poissons exotiques, les larves de moustique sont d’excellentes proies, abondantes dans la nature, faciles à collecter, voire à élever. Il existe près de 2000 espèces de moustiques, mais sous nos climats seules 3 sont utilisables. Les larves de deux d’entre elles peuvent être collectées et distribuées sans risque particulier. La troisième nécessite quelques précautions sanitaires lors de la collecte et de l’assainissement .
Les deux premières sont les” larves de moustique noires” et les “larves de moustique blanches”. Les noires proviennent le plus souvent de notre moustique commun, le cauchemar de nos nuits d’été: Culex pipiens. Il est plus connu sous le nom de “cousin”. Les secondes sont également nommées “larves cristal” ou “ vers blancs “ ( Ets. Grebil ) et ont l’apparence d’un ver transparent. Cette larve donne naissance à un moustique non piqueur : Chaoborus plumicornis (= Corethra plumicornis ).
La troisième larve de moustique qui nous intéresse ici est plus connue sous l’appellation “vers de vase” Il s’agit en fait de la larve aquatique d’un moustique non piqueur du genre Chironomus, C. plumosus le plus souvent.
Le cousin, un bon moustique.......
Les larves de moustique noires vivent dans des milieux aquatiques très variables: mares de plein champs, fossés bordant les routes et chemins, flaques d’eau temporaires, abreuvoir à bétail, tonneau d’arrosage des jardiniers, citernes de récupération d‘eau de pluie..... Il s’agit d’une proie d’une excellente valeur nutritive, très appréciée des poissons de toute taille, y compris par les alevins. Au premier coup d’oeil , elles sont quelquefois confondues avec des têtards nouveaux-nés mais leur nage frétillante caractéristique évite toute erreur.
Tous les lieux de collecte de ces larves présentent deux points communs: une eau stagnante et une très légère pollution organique. Pour les collecter, une épuisette à mailles fines, adaptée à la taille du point d’eau, est utilisée. Si vous prospectez un grand biotope aquatique, une épuisette de bassin au manche télescopique est très pratique ( Gartenteich de chez Felke , par exemple).
Le point le plus délicat est la recherche des larves. Le plus simple est de prospecter systématiquement tous les points d’eau dès que la température dépasse les 15°C. Les larves, si elles sont présentes, vont disparaître dès votre approche, alertées par les vibrations de vos pas. Arrivé au bord de l’eau, patientez une minute, pas d’avantage. Les larves vont remonter respirer à la surface, la tête en bas car leur tube respiratoire se trouve à l’extrémité de leur corps. A ce moment, immergez lentement votre épuisette à demi pour collecter les larves. Si des herbes des berges sont couchées sur l’eau, passez-y votre filet, des larves s’y dissimulent souvent. L’action de pêche est à renouveler à plusieurs reprises. Les larves de moustique collectées sont transférées dans un seau en plastique avec un peu d’eau .
Si la région où vous demeurez ne recèle pas de mares, il est tout de même possible de collecter ces larves. Voici comment. Dès que la température de l’air dépasse les 15°C, observez le régime des pluies. Une semaine après un fort épisode pluvieux, prospectez les fossés qui bordent les petites routes de campagne. Très souvent, ils regorgent de larves de moustique. A ce moment, elles sont encore de petite taille ( 2 à 3 mm), mais elles constituent souvent une véritable manne.
Dans tous les cas, dès que le temps devient doux, les moustiques sont de retour et leurs larves présentes en beaucoup d’endroits. Une fois collectées, elles sont abondement rincées à l’eau claire et disposées dans un large récipient avec peu d’eau. Tout insecte aquatique ou autre larve est à retirer, à moins d’être initié dans ce domaine.
Attention pour la distribution !
Si vous ne désirez pas encourir les foudres de votre entourage, il convient d’être vigilant pour la conservation et la distribution des larves de moustique noires . Afin de ralentir la métamorphose des larves en nymphes ( elles ressemblent à des diablotins et nagent à l’endroit) puis en moustiques, il faut les placer à basse température, dans le compartiment à légumes d’un réfrigérateur. Elles sont placées dans des boîtes étanche, de large surface, avec peu d’eau. La surface revêt plus d’importance que le volume. Si l’eau est renouvelée tous les 3 jours, les larves restent vivantes une dizaine de jours , sans perdre de leur valeur nutritive. Lors de la distribution, il faut procéder à plusieurs petits nourrissages plutôt qu’ à un grand. Les larves distribuées en surnombre vont se dissimuler et se transformer rapidement en moustiques prêts à piquer!
Un élevage des plus faciles
L’élevage des larves de moustiques du genre Culex est peu pratiqué. C’est dommage car il est facile à mener et productif . Il permet de disposer d’une nourriture relativement abondante pendant plusieurs mois: 5 dans l’Est de la France, sans doute bien plus dans les régions au climat plus clément !Habituellement, il se pratique dans un jardin mais peut fort bien être mené sur un balcon. Le matériel utilisé est peu onéreux; il s’agit de caisses en plastique utilisées pour le rangement. Celles de 35 litres (45 x 35 x 23 cm) conviennent le mieux . Pour une production en continu, trois récipients de ce type sont nécessaires. Ils sont installés dans un endroit ensoleillé une partie de la journée seulement.
Pour attirer les moustiques femelles, une légère pollution est crée. Dans ce but, un bas en nylon rempli de foin sur une longueur de 20 cm est déposé dans chaque bac. Passées 72 heures, l’eau est troublée par la présence d’innombrables infusoires. C’est le moment de retirer le bas. Le milieu est prêt pour la ponte des moustiques. Les oeufs sont déposés à la surface de l’eau. Ils sont très petits et forment une barquette noire de 5 à 10 mm de long. Chacune d’elles compte de deux à trois centaines d’oeufs !
Si vous souhaitez nourrir des alevins, il suffit de prélever les oeufs à l’aide d’une cuiller et de les poser directement à la surface du bac des alevins. Les larves de moustiques éclosent en 3 à 4 jours et mesurent alors de un à un millimètre et demi. Elles sont avidement consommées; leur nage frétillante doit sans doute exercer un effet stimulant sur l’appétit des poissons.
Dans les récipients d’élevage, une première récolte est possible une semaine après l’apparition des premiers oeufs. Les larves sont pêchées à l’aide d’une épuisette à maille de 2 mm pour ne prélever que les plus grosses. Pêché tous les trois jours, chaque récipient produit une centaine de larves. Passés 15 jours, le milieu s’étant épuisé, un nouveau boudin de foin doit être utilisé. Du lait peut également être utilisé pour créer une légère pollution organique. La quantité de lait à utiliser est de 30 gouttes par litre d’eau.
Dans les DOM TOM, d’autres larves de moustique peuvent être élevées; il s’agit de celles des moustiques du genre Anophèle. L’élevage est similaire à cette différence qu’il faut introduire des lentilles d’eau car les femelles de ce genre viennent déposer les oeufs sur les plantes flottantes.
Les larves de moustique blanches
Ce sont des larves de moustiques non piqueurs : Chaoborus plumicornis. On les trouve essentiellement durant les mois les moins chauds de l‘année mais elles passent souvent inaperçues lors de la prospection des points d’eau car elles sont transparentes et peu mobiles. De la surface, on aperçoit un pseudo ver transparent doté d‘une sphère brillante à une extrémité, flottant horizontalement entre deux eaux . D’une longueur de 2 cm et de 2 mm de diamètre , il est doté d’une tête inquiétante, genre mante religieuse... En fait, cette larve est strictement planctophage; les alevins ne sont pas en péril !
Les lieux de vie de ces “ vers blancs” sont des eaux closes permanentes , essentiellement forestières : mares, trous d’eau, bassins de retenue, tourbières ... Pour les pêcher, une épuisette à manche télescopique et aux mailles fines est la plus appropriée; inutile de risquer un enlisement dans le fond très meuble de ces biotopes. Par temps ensoleillé, le plancton et les larves de Chaoborus se concentrent dans les endroits les plus lumineux. Le reste du temps, il faut prospecter tout le plan d’eau. En général, les larves se rassemblent à proximité des branchages immergés et des racines . L’action de pêche consiste à passer le filet de l’épuisette à proximité de ces obstacles, sans soulever les sédiments et les feuilles mortes du fond , tout en décrivant de larges huit horizontaux dans l’eau. Il est fréquent de pêcher des daphnies ou des cyclops en compagnie des larves de Chaoborus. Le contenu de la pêche est déposé dans un seau blanc et , à moins de connaître les insectes et larves carnassières tout ce qui ressemble à un scarabé ou qui se déplace sur ses pattes doit être écarté. En hiver, il y a très peu de choses à retirer .
Avant conditionnement pour stockage et distribution, le contenu de la pêche doit être placé dans une épuisette et rincé à l’eau du robinet . Placées dans une boîte avec un peu d’eau et déposées dans le compartiment à légumes d’un réfrigérateur, les larves peuvent se conserver deux semaines , en renouvelant l’eau tous les trois jours. Une autre solution consiste à les placer dans une cuve de stockage et à les nourrir de temps en temps avec des nauplies d’artémias .En procédant ainsi, la conservation est beaucoup moins longue , surtout si la température dépasse les 20 °C.
Lors du nourrissage des poissons, les larves peuvent être distribuées très largement . Elles demeurent vivantes dans l’aquarium jusqu’à ce qu’elles soient consommées. Si elles ne le sont pas, elles se muent en un moustique qui ne pique pas. Prévenez tout de même votre entourage du caractère inoffensif des moustiques qui peuvent alors apparaître aux abords de votre aquarium.
Les vers de vase
Qui ne les connaît pas? Avec les nourritures sèches et les artémias, les vers de vase figurent parmi les aliments les plus fréquemment distribués aux poissons exotiques. En fait, ce ne sont pas des vers mais les larves aquatiques de moustiques non piqueurs de la famille des Chironomidés. Le plus souvent , il s’agit de C. plumosus . Ces “vers” fréquentent les eaux courantes ou oxygénées lourdement chargées en matière organique. Ils vivent là, à demi enfouis dans la vase qu’ils ingèrent.
Où les trouver ? Le faux bon tuyau qui se transmet de bouche à oreille indique les stations de lagunage. Ils s’agit de stations d’épuration qui assainissent les eaux usées dans de très grands bassins successifs , par épuration naturelle. Effectivement , les vers de vase y pullulent mais les risques sanitaires sont très importants, tant pour les poissons que pour le “tireur de vers de vase”. Il est quasiment impossible de purger ces vers de la boue chargée de germes pathogènes et de métaux lourds qu’ils ont ingérée.
Recherchez les fermes !
Pour trouver des ruisseaux aux vers de vase plus sains, le plus rationnel est de se procurer une carte IGN et d’y repérer les petits cours d’eau permanents. Ensuite, il faut sélectionner les portions bordées par une exploitation agricole. Les vers de vase qui vivent dans ces portions de ruisseaux sont faciles à assainir. Pour savoir si les larves de Chironomus sont présentes, il faut observer les secteurs vaseux en aval des bâtiments . De nombreuses petites tours de boue d’une hauteur de un centimètre indiquent la présence des vers. Elles sont constituées de mucus produit par les vers et de boue.
Il existe plusieurs méthodes plus ou moins fatigantes et peu ragoûtantes pour “tirer “ les vers de vase. La méthode décrite ici évite la manipulation de vase et se révèle souvent très productive. Le revers de la médaille est qu’elle ne se pratique qu’en période de temps lourd ou orageux .A ce moment, les vers sortent de la vase et sont entraînés par le courant. Un filet judicieusement placé permet une abondante récolte de vers de toutes tailles .
Une autre utilisation des collants en nylon
Les filets sont installés tous les dix mètres après un secteur à vers de vase. Trois parties les composent : le filet, l’armature et les piquets de maintien. Un peu de bricolage est nécessaire.
Le cadre du filet est réalisé avec du fer à béton de 6 mm de diamètre. En s’aidant du rebord d’un muret ou d’un parpaing, un rectangle de 35 cm de long sur 30 cm de large est réalisé par pliage. Les deux extrémités de la tige de fer peuvent être ligaturés avec du fil de fer ou soudées. Le filet vient se placer sur l’armature; il s’agit simplement d’un collant en nylon, taille 1. L’élastique de la taille vient recouvrir l’armature et maintient le filet en place. Pour pouvoir vider aisément le filet, chaque pied du collant est coupé et un noeud facile à ouvrir est réalisé.
Pour maintenir l’ensemble, deux piquets de 60 cm sont utilisés. Ils sont réalisés à partir d’un fer à béton d’un diamètre de 10 mm. Enfoncés dans le lit du ruisseau, ils servent d’appui au cadre du filet. Gonflés par le courant, les deux jambes du filet vont atteindre 20 cm de diamètre et une longueur de deux mètres ...... Par temps orageux, les filets sont à inspecter quotidiennement. Pour la récolte, munissez-vous de gants de ménagère, d’un seau et de bottes. Chaque jambe du filet est sortie de l’eau et le noeud défait dans le seau. Après récolte des vers, le filet est retiré de son cadre puis rincé pour le débarrasser de la boue qui peut le colmater. Si les vers de vase ne sont pas au rendez-vous, revenez deux jours plus tard. C’est une technique qui en vaut la peine.
La récolte effectuée ne peut être distribuée telle quelle. Il faut tout d’abord retirer tout ce qui n’est pas un vers de vase .Pour cela, la récolte est versée dans une passette ménagère aux mailles métalliques. Le contenu est étalé sur un journal et les indésirables retirés avec une pincette.
Une épaisseur de un centimètre de vers est ensuite placée dans une petite caisse en polystyrène utilisée pour la vente de la viande dans les grandes surfaces. Un centimètre d’eau vient recouvrir le tout qui est alors placé dans un endroit sombre et frais, mais pas au réfrigérateur. L’objectif de la manipulation est de purger les vers de la boue qu’ils ont ingérée; au froid, leur métabolisme est trop ralenti pour cette opération. Quotidiennement, pendant quatre jours, les vers de vase sont rincés et l’eau renouvelée. A partir de ce moment, ils peuvent être distribués à nos pensionnaires.
A partir de ce moment, la méthode de conservation la plus appropriée est la conservation sans eau, dans le bac à légume d’un réfrigérateur. Pour cela, les vers sont emballés dans plusieurs épaisseurs de papier essuie-tout et placés dans une boîte étanche. Ils peuvent ainsi se conserver une semaine sans difficulté. Pour juger de leur fraîcheur, il faut observer la couleur de la masse de vers. Celle-ci doit être rouge bordeaux; si elle devient noire, les vers ne sont plus frais. Mieux vaut alors les jeter.
Les vers de vase peuvent également être congelés. Il suffit de les placer , sans eau, dans un sachet de congélation et de former une galette de moins d’un centimètre d’épaisseur., aisément cassable à la main une fois congelée. Pour les aquariophiles qui n’ont ni l’opportunité ni le temps d’arpenter les campagnes et les forêts à la recherche de nourritures vivantes, le commerce aquariophile en propose, conditionnées en petits sachets ou en blisters. La qualité des vers de vase fournis par des établissements qui font référence en la matière ( les établissements Grébil, par exemple) permet d’éviter tout problème sanitaire .
Collectées ou élevées par vous-même ou bien achetées dans le commerce aquariophile, les larves de moustique de tout type constituent un irremplaçable apport de vitamines pour vos poissons. La nourriture vivante distribuée à nos pensionnaires apporte ce plus qui fait la différence entre un aquarium “qui tourne” et un autre peuplé de beaux poissons au mieux de leur forme , de leurs couleurs et qui se reproduisent plus volontiers.
Article de Serge PIERRET, paru dans Aquarium Magazine